Dans cet article, je t’invite à venir revivre mon double Ultra-Triathlon dans la région de l’Oregon aux USA pour la 3ème épreuve de la coupe du monde.
Au programme : 7.6km de natation, 360km de vélo et 84.4km de course à pied.
3ème manche de la Coupe du Monde d’Ultra-Triathlon
Cette troisième course se déroulait dans l’Oregon, donc cette fois à l’Ouest des Etats-Unis. Je m’y rendais pour la première fois et plutôt serein puisque j’avais réussi les deux précédentes épreuves, même si ç’avait été dans la douleur. Ma seule crainte concernait le décalage horaire, conséquent : neuf heures de différence avec l’heure française. Or, en ultra triathlon, les trois facteurs-clés sont l’entraînement, le sommeil et l’alimentation. Je suis un gros dormeur, j’ai du mal à gérer le manque de sommeil et ne pouvant me rendre sur place que trois jours avant la compétition, je disposerais peu de temps pour m’acclimater. Tant pis, pas le choix. Je me suis rassuré en songeant que c’était un petit format, « seulement » un double Ironman.
Mon ami Stéphane m’accompagnait pour assumer la logistique ; tout se présentait bien. Il avait réservé la location de voiture et l’hébergement, dans un bel hôtel avec piscine à dix minutes du site de l’épreuve. Nous avons visité la région, j’ai réglé le vélo, couru un petit footing et surtout, j’ai réussi à me caler sur l’horloge locale.
J’ai commis une erreur en ne repérant pas le futur parcours du vélo, ce qui m’aurait permis de découvrir ses reliefs. Jusqu’ici, le vélo s’était toujours déroulé sur un circuit sans relief, j’ai supposé que ce serait comparable ici. J’ai juste vérifié si la natation se déroulait en piscine, comme je l’espérais, ou en eau vive. C’était malheureusement dans un lac, moyennant quoi j’allais nager de manière moins linéaire et par conséquent, plus longtemps, mais tant pis ; au moins, ce site était très beau.
La veille de la course, nous sommes venus pour la remise des dossards et la présentation des athlètes, pénétrant dans un très grand parc sérieusement vallonné. Plus nous avancions vers le lac, plus le dénivelé s’intensifiait : ça montait, descendait, remontait… En arrivant au lac, j’ai demandé à l’organisateur où se trouvait le circuit vélo :
- C’est la route par laquelle vous êtes arrivés, qui fait ensuite le tour complet du lac ; le parcours est constitué de 25 fois le tour.
Aïe, aïe ! Une fois l’administratif réglé, Stéphane a emprunté un vélo pour m’accompagner et nous sommes partis en repérage. J’ai tout de suite compris que je n’avais ni les jambes, ni les bons pignons sur mon vélo. Cela allait être compliqué.
Le tour du lac représentait un peu moins de 15 kilomètres. Dans la côte principale, pour le repérage, je roulais à 12 kilomètres/heure. Il m’est apparu qu’au bout de quelques tours, je mettrais pied à terre et ce constat m’a mis la boule au ventre. La natation en eau vive, un parcours vélo très vallonné… mon optimisme initial s’était envolé.
Nous sommes rentrés à l’hôtel passer une bonne nuit. Le lendemain, cela démarrait à 7 heures. Contrairement à ces derniers jours, un peu nuageux mais secs et doux, la météo locale prévoyait désormais de la pluie, pour plusieurs jours. Cela s’est confirmé au matin du jour J. Pour la natation, aucun souci, mais pour le vélo…
Nous avons assisté à la cérémonie d’ouverture, assez grandiose, durant laquelle une jeune chanteuse a superbement interprété l’hymne national américain.
Dans le lac, malgré sa beauté en surface, j’ai découvert un fond vaseux désagréable et une eau assez trouble. J’allais devoir faire avec et c’est parti pour 7,6 kilomètres de nage. J’ai commencé tranquillement et jusqu’au 5ème kilomètres, ça allait. Ensuite, cela a sérieusement tiré sur les bras. J’ai fini 14ème sur 15 compétiteurs. Je me suis vite changé et ai enfourché mon vélo pour 360 kilomètres sous une pluie battante qui n’a plus cessé. Mal équipé, j’ai vite été trempé.
Mes jambes ont tenu, par contre, j’étais obligé de freiner en descente, à cause de toute cette pluie, alors que j’aurais aimé regagner du temps et me détendre un peu dans ces moments-là.
Jusqu’au 200ème kilomètre, cela s’est passé correctement, puis la fatigue est arrivée, la nuit est tombée, la pluie s’est intensifiée, le froid s’est installé. Dur, dur…
Nous avions 39 heures pour boucler cette course au lieu de 36 habituellement, parce que le parcours vallonné en fait la deuxième plus difficile des championnats du monde. Cela me laissait une chance d’y parvenir. Cependant, je montais désormais le col principal à 5 ou 6 kilomètres/heure en y laissant une énergie folle. Puis à 3 kilomètres/heure. Puis je l’ai monté à pied. J’ai calculé qu’il me restait sept tours à parcourir et qu’ils me prenaient à chaque fois une heure, à présent, alors qu’il ne me fallait que 35 minutes au début. Mathématiquement, j’allais manquer de temps pour boucler les deux marathons. Était-il judicieux de continuer et de m’épuiser en profondeur face à cet échec inéluctable ? Non, ai-je conclu, mieux valait garder mes forces pour l’épreuve suivante. Au 250ème kilomètre, j’ai annoncé à Stéphane que j’allais abandonner. Un choix très difficile, c’était mon premier abandon et ce n’est pas du tout dans ma nature, seulement il était plus intelligent d’arrêter que d’aller trop loin et de me blesser inutilement, m’obligeant à renoncer au reste de la saison et au titre mondial que je convoitais.
J’étais soulagé d’enlever ces vêtements trempés et de me reposer, mon corps m’a dit merci. Stéphane a fait ce qu’il a pu pour me réconforter. J’ai analysé mes erreurs, afin qu’elles me servent pour la suite : mauvais choix des vêtements, un vélo pas adapté, ne pas avoir repéré le parcours vélo…
Le lendemain, nous avons profité de la piscine de l’hôtel. J’ai fait le bilan de l’aventure avec Stéphane et tout noté sur une feuille, dressant une liste de matériel à acquérir. J’ai décidé d’acheter un vélo plus moderne et des vêtements de pluie. Il était hors de question de vivre un autre abandon !
J’avais hâte de tourner cette page, de rentrer en France et de revoir ma logistique, mon matériel. J’ai annoncé mon échec à madame et à quelques amis, qui ont eu du mal à me croire. Ma femme m’a rassuré de son mieux :
- Tu vas rebondir. Fais-toi plaisir pour la prochaine fois !