Ultra Tunnel
320 km
Bath – Angleterre
31 mars 2023

Table des matières

Dans cet article, je t’invite à venir revivre mon expérience unique de l’Ultra-Tunnel à Bath en Angleterre.
Au programme : 320 km de course à pied à réaliser dans un tunnel long de 1.6 km et dans l’obscurité totale.

Ultra Tunnel 320 km

 

Avant ce programme chargé relatif aux championnats du monde, j’ai voulu participer à une compétition quelque peu délirante dont on m’avait parlé fin 2021 : « l’ultra tunnel », organisé à Bath, en Grande-Bretagne, mi-mars 2023. Elle consistait à courir 320 kilomètres dans un tunnel de 1,6 kilomètre quasiment pas éclairé, en moins de 57 heures. Cette épreuve réputée très difficile est organisée depuis 2019 dans un tunnel sur une voie ferrée désaffectée et transformée en voie piétonnière et cycliste. J’aime bien le côté « hamster » de courir en boucle et le côté farfelu de cette course m’intéressait. Je me suis inscrit.

L’organisateur ne prenait que 32 inscriptions, pour des raisons de sécurité. J’ai été accepté. En me renseignant, j’ai appris que sur les 120 athlètes environ ayant participé aux quatre premières sessions, il n’y avait eu que dix finishers. Cela m’a intrigué. Était-ce si difficile de courir dans le noir ? J’ai réfléchi à la manière de m’entraîner le plus efficacement possible et trouvé les coordonnées d’un Français qui y avait participé. Je l’ai contacté et il m’a expliqué qu’il ne recommencerait pas, jugeant que l’épreuve était trop dure, au point qu’il avait souffert d’hallucinations en raison de l’obscurité.

En creusant le sujet, j’ai appris que seuls deux finishers étaient descendus sous les 50 heures, les huit autres se situaient entre 52 et 57 heures. Je pensais raisonnablement parvenir à un résultat comparable. Le seul bémol, c’est que cet ultra tunnel se situait en tout début de saison d’ultra triathlon, après une longue pause, je manquais un peu d’entraînement.

L’organisateur communiquait peu. Il m’a transmis les coordonnées GPS du tunnel ainsi que le règlement intérieur, assez succinct : notre matériel devait tenir dans une caisse et rester à l’extérieur du tunnel. Soit. Je suis parti en voiture, seul, en direction de Calais, pour emprunter le tunnel sous la Manche. Ce n’était pas facile de rouler à gauche de l’autre côté mais tout s’est bien passé.

J’étais le seul Français inscrit et je ne parle pas la langue, ce qui compliquait un peu la situation. Je suis arrivé deux jours avant le top départ, pour m’acclimater et bien repérer les lieux, et me suis installé à l’hôtel. Je suis ensuite reparti en direction du tunnel que j’ai mis une bonne heure à trouver et j’avoue que cela ne donnait pas envie d’y pénétrer, c’était glauque, sombre, froid ; en prime, il pleuvait abondamment. J’ai songé que puisque nous devions manger et faire nos pauses dehors, s’il pleuvait comme actuellement, ça ne serait pas une partie de plaisir. J’ai prévu d’apporter un parapluie.

Le départ a été donné à 14 heures, ce qui m’a permis de dormir jusque vers 10 heures, seulement j’ai commencé à piocher dans ma réserve d’énergie de 10 heures à 14 heures. Je suis arrivé sur place avec mon matériel à midi. Je ne respectais pas le règlement intérieur, j’avais apporté plus d’une caisse mais on ne m’a rien dit. Il a commencé à pleuvoir. Heureusement, j’avais une bâche dans la voiture pour protéger mes affaires. Je suis allé me reposer un peu à l’entrée du tunnel.

L’organisateur est arrivé trente minutes avant la course, nonchalant. Nous avons récupéré nos dossards puis il a fait un briefing on ne peut plus bref :

  • Vous courez à gauche. Si vous sortez du tunnel au-delà de vos caisses, vous serez éliminés. Formez une ligne et dans cinq minutes, c’est parti !

Nous avons couru à la queue-leu-leu et j’ai commencé à doubler ceux qui me précédaient jusqu’à me retrouver en sixième position. A mi-parcours, des haut-parleurs diffusaient une musique assez stridente, du violon, créant une ambiance bizarre. Quelques faibles lumières éclairaient parcimonieusement le tunnel. Les allers retours se sont enchaînés sur 80 kilomètres et là, je me suis offert ma première pause. Cela m’a permis de comprendre la difficulté : devant tenir le parapluie d’une main sous une pluie battante, je n’ai pas pu masser mes pieds ni me préparer un repas chaud, alors qu’il faisait très froid et humide. J’ai dû renoncer. Lorsque j’ai repris la course, j’ai appris qu’il y avait déjà eu neuf abandons et cela m’a étonné.

À mi-course, c’est-à-dire 160 kilomètres, il y avait une première barrière horaire : nous devions y arriver en 25 heures maximum. Les défections s’enchaînaient : nous n’étions plus que douze participants à 150 kilomètres, soit un tiers des athlètes inscrits au départ, puis neuf participants à 160 kilomètres… Toutes les quatre heures, l’organisateur affichait le classement et les abandons sur un tableau papier. Au 170ème kilomètre, après avoir tout calculé et recalculé dans ma tête, il m’est apparu impossible de franchir la ligne avant les 57 heures. J’ai pris la sage décision d’arrêter : j’approchais des 35 heures. L’organisateur m’a incité à aller quand même au bout de l’épreuve seulement deux semaines plus tard, j’allais courir un double Iron man en Floride, mieux valait me ménager à partir du moment où il était établi que je ne tiendrais pas la barrière horaire. Je suis rentré me reposer à l’hôtel. J’avais du mal à marcher et monter l’escalier jusqu’à ma chambre s’est avéré éprouvant. Heureusement, après quatre jours de repos, j’avais bien récupéré.

J’étais déçu de mon échec mais je considérais avoir vécu une expérience originale. J’ai bien l’intention de participer de nouveau à cette épreuve en 2025 et à présent que j’ai découvert et bien analysé le contexte, je compte en être finisher, la prochaine fois. J’irai avec un assistant pour pouvoir manger chaud même s’il pleut à torrents.

Rentré en France, j’ai organisé mon début pour la Coupe du Monde d’ultra triathlon. Le programme 2023 s’avérait particulièrement excitant. J’avais participé à un double déca en 2016 mais au format journalier : un Iron man par jour. Là, cela se déroulait en continu, ce qui complexifie singulièrement l’épreuve. J’entendais bien en être finisher. Je n’osais pas trop rêver d’un podium mais je me disais quand même que ce serait encore mieux, bien sûr.